Dans ce présent article, découvrez 6 images naïves utilisées par M. Chateigner qui induisent en erreur ses auditeurs.
Pour connaître le contexte de cet article, je vous invite à lire l’article d’introduction au travail réalisé :
Propos de M. Chateigner concernant la méthanisation du fumier compact stocké en bout de champ :
« Un prétexte vachement marrant, on vous dit : « oui mais moi plutôt que le tas de fumier soit au bout du champ au lieu d’émettre du méthane, il vaut mieux le méthaniser proprement dans le méthaniseur ».
Donc je dis « oui l’idée est bonne, mais le problème c’est que la réalisation ne l’est pas ».
Parce que le tas de fumier, il va être positionné sur les zones d’intrant en plein air du méthaniseur, avant d’être ingurgité à un moment donné, donc au lieu d’émettre au bout du champ, il va émettre sur le tas d’intrants.
Ce qu’on aura gagné c’est le voyage entre les 2 qui aura émis encore plus, alors que ce qu’il ne faut pas faire c’est mettre le fumier en tas.
Il faut le répartir dans le champ, c’est tout, et là on a tout gagné parce que l’on enrichit le champ, et on évite les émissions.
Donc encore une fois on compare par rapport à ce qui est mauvais, c’est toujours comme cela. «
Observations d’OPTIBIOM :
En méthanisation agricole à la ferme, cette affirmation est fausse pour les raisons suivantes (exemple d’un fumier bovin) :
- Le fumier à méthaniser vient de la stabulation proche du méthaniseur, il n’y a pas d’aller/retour entre le bout de champ et le méthaniseur puisque l’unité de méthanisation est implantée sur l’exploitation agricole ;
- Entre le stockage en bout de champ et la méthanisation du fumier, la dynamique de gestion n’est pas du tout la même. En bout de champ, le stockage avec les émanations associées peut durer 9 mois. Dans les études d’impact non associée à une exploitation identifée, la durée moyenne de stockage retenue est de 180 jours de stockage à l’air libre. Lorsque le fumier est méthanisé, il doit être frais, c’est à dire que la stratégie est de sortir de la stabulation un tonnage de fumier qui permet son introduction dans le digesteur en 7 jours maximum. Si la durée est plus importante, le processus de compostage diminue la matière organique disponible pour la méthanisation (le carbone est libéré dans l’atmosphère sans valorisation énergétique). Lorsque le méthaniseur est petit par rapport au tonnage qui se trouve dans une stabulation, les agriculteurs fragmentent le currage de la stabulation, en travaillant case par case, et non sur la totalité de la surface du bâtiment. Ainsi il y a moins d’émanation à l’air libre lorsque l’on méthanise du fumier, comparativement à un stockage en bout de champ ou sur plateforme.
- Le fumier lors de son stockage perd du carbone spontanément. Cette perte de carbone se fait naturellement par compostage et par méthanisation. Un tas de fumier méthanise spontanément à chaque fois que le fumier est humide. La méthanisation spontanée est donc plus forte pour les fumiers mous et les lisiers que les fumiers compacts sans écoulement que l’on retrouve en bout de champ. Toutefois même pour ces derniers qui se retrouvent en bout de champ, les pluies, la rosée et la production d’eau issue du compostage spontané, vont engendrer des conditions favorables à la méthanisation spontanée de la matière organique. Tout promeneur peut se rendre compte de cette perte de carbone spontanée car le tas de fumier réduit de masse. A noter que le compostage spontané engendre une perte d’azote par évaporation, que le processus de méthanisation dans un digesteur évite.
- Si les agriculteurs font des tas de fumier en bout de champ et n’épandent pas directement sur la parcelle, cela s’explique par le fait qu’il y a un décalage entre la nécessité de nettoyer/vider les stabulations et la possibilité d’épandre le fumier sur la/les parcelle(s). Par exemple on ne peut pas répartir le fumier si une culture est en place, ou si la portance du sol n’est pas suffissante suite à un phénomène pluvieux intense. Lorsque l’on réalise une étude d’impact en comparant la situation avant la mise en place d’une unité de méthanisation, et la situation après sa mise en place, les analystes comme nous-mêmes, prennent en compte la gestion réelle de l’exploitation, et non une gestion fictive qui ne peut pas être mise en place par les agriculteurs. Contrairement à ce que soutien M. Chateigner à la fin de son propos, la comparaison n’est pas par rapport « au mauvais », mais par rapport « au réel ». Normalement un scientifique est attaché au réel comme nous le sommes, car sa démarche consiste à observer la dynamique du réel, à la mesurer et à la modéliser pour expliquer le passé, le présent et le futur d’une situation. La démarche qui consiste à comparer une situation à un imaginaire irréaliste, appelé « le mieux » par M. Chateigner n’a aucune affinité avec une démarche scientifique.
Propos de M. Chateigner concernant l’empreinte carbone de la méthanisation :
« Est-ce qu’il y a des gaz à effet de serre, bien sûr ! Je ne vais pas revenir dessus mais sachez que quelle que soit la méthode que vous utilisez, si vous produisez du CO2 il y en a de toute façon 44% qui restent dans l’atmosphère sur un temps très long et que donc la méthanisation participe à cela. Et que vu les très faibles rendements de la photosynthèse tout ce qu’on vous raconte sur les circuits courts du CO2, de la photosynthèse et tout ça, est une vraie illusion, la réalité c’est que vous aurez peut-être 1% de tout ce que vous émettez qui va être repris par la photosynthèse et méthanisable à un moment. Le rendement est vraiment désastreux »
« Les micro-organismes du digesteur, chaque fois qu’ils produisent 60 molécules de CH4 utiles pour l’énergie, ils produisent aussi 40 molécules de CO2 qui viennent nous réchauffer et donc ça, cela veut dire que par kwh provenant de la méthanisation, on a déjà 40% de CO2 en plus que si on utilise le gaz naturel, et on peut rien y faire à cela. Et ça, ça doit être comptabilisé en principe, or cela ne l’est pas, l’ADEME ne le comptabilise pas car eux disent que c’est la photosynthèse, donc en fin de compte ce que l’on émet comme on l’a pris dans l’air c’est bon, mais la réalité est autre puisque le GIEC nous dit que quand on émet dans l’air il en reste 40% pendant 2000 ans, donc finalement le cycle est ouvert vers le haut Tout ce que l’on envoie par le haut on n’est pas capable de le ramener par le bas, par la photosynthèse. Ceux sont des langages exprès pour pouvoir développer une filière. Là encore le mot clé le plus important c’est la dépendance des gens qui viennent vous parler. Si vous parlez à l’ADEME, ils n’ont pas de laboratoires, ceux ne sont pas des chercheurs, ils sont là pour vendre la soupe des gouvernements quel que soit le gouvernement. Les gaz à effet de serre, les PRG cela leur passe au-dessus un peu de la tête. Quand vous parlez à Solagro, je suis désolé Solagro n’a pas de laboratoire et quand ils ont embauché 10 personnes sur la méthanisation, forcément ils ne vont pas dire qu’elle est mauvaise. Donc nous on est indépendant, et tout ce qu’on écrit est en accès libre, donc je pense que si nous avions torts ils nous l’auraient signalé, mais ils ne le peuvent pas. »
Observations d’OPTIBIOM :
Je crois que cette représentation naïve de la réalité est ma préférée, car on y trouve tous les ingrédients d’une démarche irrationnelle et manipulatrice. En voici l’explication :
- Tout d’abord vous aurez remarqué que M. Chateigner ne fait pas la distinction de l’origine de la molécule de CO2 pour fonder sa critique, sous prétexte que le rendement de la photosynthèse est trés faible. Ainsi dans le volume constant que représente l’atmophère, que vous relarguiez 100 millions de tonne de CO2 qui ont été stockés il y a des millions d’années, ou que vous relarguiez dans cette atmosphère 100 millions de tonnes de CO2 qui ont été synthétisés par les plantes lors de leur croissance, cela ne fait aucune différence selon M. Chateigner. L’usage des énergies fossiles ajoute du carbone dans l’atmosphère, l’usage de biogaz biogénique, c’est à dire provenant du vivant, n’ajoute rien puisqu’il ne vient pas d’un stockage provenant du sol, mais selon M. Chateigner il y a équivalence. Je vous laisse juger de la pertinence du propos au vu de cette illustration :
- De plus, M. Chateigner indique que le problème de la méthanisation est que pour 60 molécules de méthane renouvelable qui compensent l’usage de 60 molécules de méthane fossile, on créé 40 molécules de CO2 donc l’empreinte carbone est dégradée par rapport à l’usage des énergies fossiles puisque vous générez, in fine, plus de CO2. Selon lui, c’est mathématique, c’est donc juste sauf que la prise en compte de l’origine du carbone est essentielle à l’analyse pour comprendre que l’augmentation du CO2 dans l’atmosphère est liée à l’usage des énergies fossiles et non à l’usage des énergies renouvelables. D’ailleurs si l’origine du carbone n’était pas essentielle à cette analyse de la situation, alors il faudrait interdire l’usage du bois énergie en urgence, car même avec une production faible de CO2 à raison de 16.4 gCO2/kWh PCI qui correspond à l’empreinte carbone directe des plaquettes forestières séches (25% d’humidité), le bois énergie augmente la concentration de CO2 dans l’atmophère. Voilà le type de conclusion que l’on peut obtenir en suivant les pas de M. Chateigner.
- Le GIEC dit l’inverse de M. Chateigner, l’usage des énergies fossiles est la cause principale du réchauffement climatique. L’usage des énergies renouvelables n’est pas remise en cause, toutefois il est essentiel de réaliser un bilan énergétique et un bilan matière pour chaque projet, afin de vérifier si celui-ci est opportun par rapport à l’usage de l’énergie fossile et nucléaire. Car tant que l’énergie consommée n’est pas 100% renouvelable, il faut savoir que certaines stratégies de production renouvelable peut engendrer une sur-consommation d’énergie fossile. De plus il est possible de faire de l’énergie renouvelables en consommant plus d’énergie que celle produite. Cela ne pose pas de problème dans le cadre d’une production d’une matière première, mais au niveau énergétique cela n’a aucune opportunité. Il faut veiller à toujours produire plus d’énergie que ce qui est consommé. Le problème avec le discours de M. Chateigner est que nous ne sommes pas pret à produire 100% de notre énergie consommée avec des process renouvelables, et pourtant il y a urgence.
- Si Solagro et l’Ademe n’ont pas encore indiqué à M. Chateigner qu’il a tort, alors prenez bien en compte que OPTIBIOM l’affirme et le démontre. Mais ayez en tête que comme M. Chateigner indique à ses auditeurs qu’il est préférable d’utiliser du gaz fossile plutôt que du gaz biogénique provenant d’unités de méthanisation agricole, je ne vois pas pourquoi Engie ou Total Energies via des bureaux d’études, investiraient de l’argent pour montrer les incohérences des propos de M. Chateigner. Je pense que son discours leur convient pour le moment, d’autant que M. Chateigner malgré ses efforts n’arrive pas à bloquer la construction de leurs unités de méthanisation centralisées. Ce sont les petits porteurs de projets, les agriculteurs énergéticiens locaux qui sont les victimes du discours de M. Chateigner.
- Concernant la photosynthèse, le GIEC est en opposition totale avec M. Chateigner car la balance des émissions « carbone » associée au développement naturel et anthropomorphique du végétal, est positive (Par an le stockage est de +3.4 milliards de tonne de CO2, plus ou moins 0.9, cf. la publication ci-dessous provenant du rapport 6 du GIEC). A noter que M. Chateigner fait référence aux travaux du GIEC qu’il reconnait comme pertinents mais il décontextualise les explications, focalisant son auditoire, par exemple sur une notion de rendement au lieu d’une notion d’équilibre (de balance ou « Budget » en Anglais) :
Quelques explications concernant cette illustration provenant d’un rapport du GIEC :
- Une flèche vers le haut indique que la source émet du CO2 dans l’atmosphère
- Une flèche vers le bas indique un puit, c’est à dire un mécanisme qui stocke du CO2
- « Gross photosynthesis » indique le processus de croissance des plantes.
- Les flèches en violet indiquent les activités humaines qui impactent le bilan CO2 de l’atmosphère
- « Net land flux », mentionne le bilan des émissions et des puits. La photosynthèse associée à l’activité humaine génère un stockage de carbone.
- « Average increase » montre la moyenne de l’augmentation qui est de +5.1 milliards de tonnes de CO2. Cela est à comparer à l’émission correspondant à l’usage des énergies fossiles de +9.4 milliards de tonnes de CO2. Voilà pourquoi nous sommes de plus en plus nombreux à proposer des solutions pour faire disparaitre le plus rapidement possible l’usage des énergies fossiles.
Propos de M. Chateigner concernant la méthanisation qui serait un process non biologique :
« C’est un réacteur chimique digne du génie des procédés, il faut des ingénieurs chimistes pour faire fonctionner cela bien sûr pas en routine, mais lorsqu’il y a un accident. Il n’y a rien de bio là-dedans, rien de vert. Ceux ne sont que des réactions chimiques que l’on maitrise plus ou moins en fonction de ce que l’on met »
« Ce n’est pas non plus une panse de vache comme certains aimeraient le prétendre. Il n’y a pas besoin d’épiloguer, cela ne se ressemble pas du tout mais au-delà de cette boutade, on ne donne jamais à manger des effluents d’élevage à une vache, enfin je l’espère, et vous voyez bien que le méthaniseur est optimisé pour créer CH4, c’est-à-dire qu’il prend des atomes de carbone à la biomasse qui devrait retourner au sol, alors que dans la panse de vache le CH4 n’est qu’une réaction qui est en faible quantité dans l’ensemble du rumen des bovins, et qui va être expiré et que l’on pourra pas récupérer, bien entendu, bon vous voyez le travers qui va se créer tout de suite, c’est que si l’on veut développer la méthanisation avec des effluents il va falloir générer des élevages plus plus, pour avoir beaucoup d’effluents, et la majeure partie du méthane va être, expirer par la vache et donc ne sera absolument pas récupérable. Donc on va dans un cycle ou on va augmenter forcément les gaz à effet de serre »
Observations d’OPTIBIOM :
- Le terme « réaction chimique » à 2 significations dans le langage commun : soit il est fait référence à une recombinaison d’atomes et cela n’a rien à voir avec le fait que le process soit naturel ou pas, soit l’orateur cherche à opposer le « chimique » avec le « bio et le vert », c’est à dire que maladroitement il fait référence à une réaction artificielle crée par l’humain, qu’il oppose à une réaction biologique générée spontanément par la nature. Un exemple classique est la production de l’Hydrogène par électrolyse de l’eau qui est une transformation créée par l’humain en utilisant de l’électricité, elle est donc « chimique ». Par contre le compostage, étant une transformation biologique spontanée, est qualifié et reconnu de « vert et bio », même si cette transformation sur les unités de compostage, consomme de l’énergie (de transport et d’aération essentiellement). Souvent quand une personne fait référence à une transformation chimique, elle cherche à provoquer un rejet de la part de son public, ce qui explique l’usage de ce terme par M. Chateigner. Faisons une petite analyse de la situation.
- Dans la nature la dégradation de la matière organique peut se résumer, dans le cadre de notre étude, à 2 filières : lorsqu’il y a suffisament d’oxygène, des micro-organismes compostent la matière organique, lorsque l’oxygène manque, celle-ci est méthanisée. La méthanisation dans la nature s’observe dans certains milieux tels que les marais, et les rizières. Les termites et les ruminants sauvages ou domestiqués, méthanisent tous. Le GIEC indique dans son analyse globale des émissions et des puits concernant le méthane, que la dégradation naturelle de la matière organique est significative (voir schéma ci-dessous)
- La transformation chimique de la matière organique dans un digesteur est engendrée par des micro-organismes naturels, « verts et bio » pour reprendre le propos de M. Chateigner. Ces micro-organismes sont dans les excréments des ruminants sauvages et domestiqués. Leur présence dans les excréments des rumisants permet d’ailleurs de démarrer un digesteur avec uniquement du lisier bovin, sans faire appel à d’autres sources d’ensemencement. C’est ainsi que nous avons démarré notre dernière unité de méthanisation agricole à la ferme début 2024. Il me semble donc trés difficile de prétendre que la méthanisation n’est pas un procédé naturel de dégradation de la matière organique… Se pose la question donc du besoin d’avoir un digesteur, pourquoi construire un digesteur si c’est naturel ? La réponse est simple, cette dégradation naturelle se fait spontanément lorsqu’il y a peu d’oxygène, donc il est nécessaire si on veut bénéficier de cette dynamique naturelle de créer un environnement favorable à la multiplication des micro-organismes, ce que le digesteur permet. A noter que nous faisons exactement la même chose lorsque l’on réalise des plateformes de compostage : on aére régulièrement par des interventions mécaniques le tas de matière organique artificiellement pour qu’il méthanise trés peu et composte un maximum. Toutefois il est difficile d’éviter totalement la méthanisation spontanée même en compostage contrôlé. Pensez vous sérieusement qu’il faille ne plus composter la matière organique sous prétexte que nous produisons par ce biais un peu de méthane et quelques émanations de biogaz ? Pensez vous que parce que nous engendrons des conditions idéales de prolifération des micro-organismes sur les plateformes de compostage, le compostage devient chimique, non bio, non vert ? La méthanisation est similaire en tout point à un compostage mais sans oxygène.
Quelques explications concernant cette illustration provenant d’un rapport du GIEC :
- Une flèche vers le haut indique que la source émet du méthane dans l’atmosphère
- Une flèche vers le bas indique un puit, c’est à dire un mécanisme qui stocke du méthane
- « Fossil fuels » identifie les émissions liées à la production des énergies fossiles : 114 à 116 millions de tonnes de méthane par an.
- Les flèches en violet indiquent les activités humaines qui impactent le bilan méthane de l’atmosphère
- « Freshwaters et Wetlands », identifient les émissions liées aux eaux douces et zones humides. Elles émettent beaucoup de méthane et pour autant il ne faut pas les assécher !
- « Average increase » montre la moyenne de l’augmentation qui est de +19 millions de tonnes de méthane. Cela est à comparer à l’émission correspondant à la production des énergies fossiles de +114 millions de tonnes de méthane. Voilà pourquoi nous sommes de plus en plus nombreux à proposer des solutions pour faire disparaitre le plus rapidement possible l’usage des énergies fossiles, et fort heureusement la production de méthane biogénique ne produit pas autant de méthane à l’air libre.
- Remarquons que la production du riz « Rice cultivation », et le cheptel domestique « livestock » produisent du méthane, mais en réduisant drastiquement l’usage des énergies fossiles et donc la production de méthane provenant de leur extraction et transport, le bilan global devient alors largement positif. Il n’est donc pas nécessaire d’abandonner les productions de riz et de viande bovines, en raison de leurs émissions de méthane, si nous faisons suffisament d’effort de réduction de nos usages d’énergies fossiles.
Propos de M. Chateigner concernant la pertinence énergétique de la méthanisation par rapport au photovoltaïque, deux domaines qui malheureusement pour lui nous maîtrisons :
« Sachez que si vous occupez un hectare avec du maïs et que vous produisez de l’énergie par méthanisation vous ferez à peu près 100 à 200 fois moins bien que si vous plantez un hectare de panneau solaire. Alors là aussi attention je ne suis pas en train de dire qu’il faut prendre des champs et mettre des panneaux solaires, mais plutôt que de mettre des subventions à la méthanisation, commençons par équiper toutes les toitures, toutes les voies ferrées, toutes les zones déjà artificialisées de panneaux solaires et vous verrez que l’on arrivera beaucoup mieux à économiser de l’énergie fossile. La méthanisation mène nulle part dans cette histoire-là, en revanche elle amène à une chose c’est qu’on consomme énormément de subventions, pour une simple raison c’est que le taux de retour énergétique, c’est-à-dire l’énergie que l’on a libérer de la biomasse celle qui nous est utile pour cuire, ou pour se chauffer rapportée à l’énergie que l’on a consommé pour cette libération, pour la biomasse vous voyez on est proche de 4, et encore tout n’est pas compté là-dedans. »
Obervations d’OPTIBIOM :
- Grosso modo, sur un hectare de terrain, il est possible de mettre en place 1 MWc de photovoltaïque, c’est à dire d’injecter sur le réseau en moyenne en France 1 000 MWh/an. La surface est alors totalement dédiée à la production électrique.
- Un hectare de maïs fourrager dédié à la production d’électrique produit par an 15 MWh et si l’on prend une quote-part de la production de CIVE (culture intermédiaire possible entre le sorgho ou le maïs), on peut ajouter annuellement 2.5 MWh/an d’électricité à la production de 15 MWh. Le calcul réalisé est le suivant : pour le maïs 40 TMB x 104 m3CH4/TMB x 38% (rendement électrique) x 95% (autoconsommation sur le cogénérateur) x 9.94 kWh PCI/m3CH4 = 15 MWh/an + pour la CIVE 20 TMB x 70 m3CH4/TMB x 38% x 95% x 9.94 x 50% (répartition de la production totale sur 2 ans) = 2.5 MWh/an. On arrive à un total de 17.5 MWh.
- 1000 / 17.5 = 58 fois plus, pas de 100 à 200 comme l’indique M. Chateigner, mais ce ratio n’est pas pertinent pour la raison suivante : la production de méthane est constante dans l’année avec une disponibilité équivalente à celle d’un réacteur nucléaire, soit 7600 heures d’injection sur le réseau à puissance nominale. L’électricité photovoltaïque est disponible uniquement lorsqu’il y a de la lumière, particulièrement disponible en été, et entre 11h00 et 16h00. En moyenne en Décembre le photovoltaïque produit 25% de la production de Juillet. La disponibilité n’est pas équivalente, la consommation énergétique de l’installation non plus, la durée de vie de l’installation non plus. Ce n’est pas comparable énergétiquement, et il nous faut les 2 avec l’éolien et l’hydroélectricité (si on se restreint uniquement à la production électrique) pour diminuer significativement notre dépendance aux énergies fossiles.
- Mais il faut en plus prendre en compte que la méthanisation génère du biométhane ce que ne peut pas faire le photovoltaïque. Le biométhane comme le gaz fossile peut être utilisé comme une matière première pour produire des engrais azotés, du méthanol, de l’ammoniac ou de l’hydrogène. Il justifie des applications industrielles à forte intensité thermique comme des process de séchage ou de cuisson (briqueterie), ou de production de vapeur d’eau ou de fonte de métaux. Ces 2 énergies, l’électricité et le biométhane, ne se substituent pas complètement en usage, car le biométhane peut être utilisé comme une matière première.
- Voici un exemple pour vous montrer que l’on peut faire dire n’importe quoi aux chiffres sans trop d’effort. En 2022, 618 135 hectares étaient alloués à la production de biodiesel et de bioéthanol (selon FranceAgriMer). Un hectare photovoltaïque produit 1 GWh par an. Donc en récupérant la surface dédiée aux agrocarburants (donc à l’énergétique) je peux injecter annuellement 618 135 GWh soit 618 TWh (Terawatt heure) sur le réseau électrique. Cette valeur est à comparer à la production électrique totale de 495 TWh en 2023 en France, et l’objectif de 2050 de consommation totale énergétique de 900 TWh. Bref, j’ai trouvé la solution énergétique renouvelable pour la France : convertissons la surface dédiée aux agrocarburants pour le photovoltaïque. Si vous ajoutez en plus quelques toitures, l’éolien offshore, l’hydroélectricité, et la micro-hydroélectricité, nous pouvons arreter toutes les autres sources de production même le nucléaire ! C’est mathématique, c’est vrai sauf que cette stratégie n’est pas compatible avec nos ressources de cuivre, d’aluminium et de quartz, si elle est appliquée à l’échelle mondiale. Mais si on vous cache cette dernière information, vous pouvez être trompé par ce type de raisonnement.
- De plus sachez que le photovoltaïque a une grande opportunité énergétique lorsque l’on investit peu d’énergie dans la construction des supports pour les panneaux. Donc la couverture des lignes ferroviaires, il faut oublier !
- La comparaison photovoltaïque/méthanisation est naïve et a peu de pertinence. On peut démontrer n’importe quoi en comparant les énergies entre elles. En ne prenant en compte que l’efficacité énergétique, M. Chateigner montre que le pétrole a une efficacité énergétique de 30 à 40 (c’est à dire que globalement chaque kwh consommé produit 30 à 40 kwh en usage), contre la valeur de 4 qu’il applique à la production de biométhane. Que faudrait-il en conclure ? On n’utilise que du pétrole ?
- Enfin sachez qu’une société qui abandonne la puissance énergétique des profondeurs doit forcément dédier de la surface pour sa production énergétique. Cela changera peut être le jour où nous aurons d’immenses structures solaires dans l’espace, ou que nous exploiterons l’hydrogène de Jupiter, mais il faut trouver d’autres solutions en attendant.
Propos de M. Chateigner concernant les CIVES, les cultures à vocation énergétique :
« J’aimerais revenir un poil sur les CIVEs, parce qu’on nous dit qu’elles jouent le rôle des CIPANs, donc je vous ai parlé de l’azote qui est pris comme prétexte, mais la réalité est que les CIVEs ne poussent pas l’hiver chez nous, et que pour les faire pousser il faut des engrais donc de toute façon c’est pire que si on ne mettait pas de CIVE. Et deuxième effet, c’est que les CIPANs, c’était de la biomasse qui retournait sur les sols, qui amendait les sols, alors que les CIVEs, c’est de la biomasse qui sert à faire du méthane, et qui ne retourneront jamais sur les sols. Donc vous voyez qu’il y a 2 effets, un effet d’amplification des nitrates, et un effet de subtilisation du carbone. En fin de compte la méthanisation ne sert qu’à pomper du carbone dans les sols, et à l’envoyer dans l’air, là où il nous réchauffe. »
Observations d’OPTIBIOM :
- Heureux est l’auditeur qui a peu de culture concernant ces choses, il écoute, il acquiesce et s’en retourne convaincu de la pertinences des propos de M. Chateigner. Pour les autres, autant dire que l’on souffre un peu d’entendre autant d’affirmations non fondées. Mais quel est le problème concernant ce propos de M. Chateigner ?
- Tout d’abord, précisons les sigles utilisés : CIPAN désigne une culture intermédiaire piège à nitrates, et CIVE désigne une culture intermédiaire à vocation énergétique.
- Concernant le premier effet mentionné par M. Chateigner, les CIVEs, comme les CIPANs, sont des cultures qui permettent une couverture hivernale des sols, et cette couverture est obligatoire en Zone Vulnérable. Elles permettent de limiter le lessivage des nitrates et lutter contre l’érosion des sols. Les cultures appelées CIPANs et les CIVEs poussent « en hiver » car leur implantation se fait en Septembre ou en Octobre, avec une récolte souvent en Avril pour s’assurer d’une production de 7 TMS/ha (7 tonnes de matière sèche à l’hectare), pour les CIVEs.
- La CIVE d’hiver, qui remplace une CIPAN, a un réseau racinaire supérieur à une CIPAN ce qui engendre plus de matière organique dans le sol et une capacité de pompage des nitrates équivalente ou supérieure à une CIPAN. Ceci est la conséquence simple du fait qu’une CIVE produit à l’hectare 4 tonnes de matière séche en plus qu’une CIPAN en partie aérienne. Le réseau racinaire est plus important pour la CIVE car tout simplement le cycle de développement est plus long que pour une CIPAN qu’elle remplace.
- La fertilisatisation de la CIVE ne se fait pas avec un engrais minéral mais avec le digestat qui est un engrais organique. Les unités d’azote nécessaires pour la pousse de la plante, qui sont exprimés en kilogramme par hectare, ne dépendent pas de la nature de l’engrais ce qui fait que les exploitants sont capables de fertiliser la CIVE uniquement avec le digestat, ce qui revient moins cher que d’utiliser des engrais minéraux produits à partir de gaz fossile. L’azote apporté est utilisé par la plante pour ses besoins de croissance.
- Concernant le second effet mentionné par M. Chateigner, il a tort sans ambiguité. On constate 2 conséquences favorables suite à la mise en place des CIVEs. Tout d’abord dans le sol il y a plus de carbone par le biais du réseau racinaire plus puissant, et suite à l’usage du digestat sur la parcelle, il y a un retour significatif de matière organique sur la parcelle cultivée.
- Concernant le retour de la matière organique via le digestat l’analyse est simple à faire et la voici : Lorsque l’on méthanise de la matière organique il y a, comme pour toute transformation moléculaire, une conservation de la masse car les atomes ne sont jamais détruits. Donc il suffit de prendre la masse de ce qui entre dans le digesteur, d’enlever la masse du biogaz produit, pour déterminer la masse de ce qui sort, celle du digestat.
- Quand une CIVE produit 7 TMS/ha en partie aérienne, elle permet de produire environ 3,3 tonnes de biogaz suite à la dégradation de la matière organique. Cette dégradation vient de la matière sèche disponible dans la CIVE. Lorsque le digestat retourne au sol, 3,7 TMS/ha retournent à la parcelle, soit l’équivalent d’un enfouissement d’une CIPAN. Le réseau racinaire plus important + le retour du digestat provenant de la CIVE génèrent un retour au sol plus important que l’enfouissement de la CIPAN, car la CIVE avec sa partie aérienne produit plus de matière organique que ce qui est prélevé pour la production de biogaz, comparativement à la CIPAN.
- Lorsque M. Chateigner indique dans son propos « que la biomasse de la CIVE ne retournera jamais au sol », il commet une erreur par méconnaisssance ou volontairement.
- Dans tous les cas, il ne s’agit pas d’une conclusion scientifiquement fondée.
Et pour finir une petite dernière, avant de passer à l’article concernant les erreurs méthodologiques de présentation.
Propos de M. Chateigner concernant les zones à atmosphères explosives :
« Alors je vais passer sur toutes ses choses-là, et j’aimerais revenir sur les aspects risques. Quand vous allez sur un site de méthanisation, vous voyez ce type de panneau : ceux sont des zones ATEX, donc à atmosphère explosive, j’ai même vu moi des agriculteurs méthaniseurs qui fumaient des cigarettes à côté des digesteurs, ou qui utilisaient leur téléphone portable. Je vous assure qu’il n’y a pas de quoi rigoler actuellement, mais on se demande s’il y a une prise de conscience de ce genre d’outil. Ces risques sont vraiment réels, alors il y a eu que quelques morts, heureusement, mais ils sont vraiment réels, pour les agriculteurs proches, et forcément ceux sont eux qui sont proches des méthaniseurs, et ensuite comme il y a des émanations, il y a forcément un risque pour l’ensemble des riverains. »
Observations d’OPTIBIOM :
- On est d’accord, cela fait peur et manifestement les agriculteurs exploitants n’ont pas conscience de tous les dangers. Et en plus il y a des émanations donc nous sommes finalement tous en danger. Comment est-ce possible que l’Etat puisse laisser faire ces choses là, que l’Allemagne avec ses 11 000 méthaniseurs ne soit pas à feux et à sang ?
- La réponse est simple, nous nous déplaçons toutes et tous régulièrement dans des zones ATEX, et malgré les émanations nous maitrisons parfaitement collectivement le risque. Et de quelles zones s’agit-il ? Les voicis :
- Il s’agit d’une station service, et toutes les stations services ont des zones ATEX. Il n’y a aucune différence avec celles qui sont sur une unité de méthanisation sauf :
- qu’une unité de méthanisation n’est pas ouverte au public. Notamment les enfants ne vont pas dans les zones ATEX…
- qu’une unité de méthanisation ne se trouve pas au milieu des villages et villes, mais sur les exploitations agricoles concernant les unités de méthanisation à la ferme
- qu’une unité de méthanisation ne dégaze pas autant qu’une station-service car il n’y a pas de transfert via des pistolets.
- qu’une unité de méthanisation n’est pas autant visitée qu’une station service.
- Pour information, la zone 2 correspond à une zone de risque en cas d’anomalie, la présence des gaz (ou vapeurs) dangereux et les substances indésirables doivent être présentes pendant moins de 10 heures/an.
- La zone 1 correspond à une zone où des gaz ou des vapeurs sont présentes dans des conditions normales, sur de longues périodes, pendant 10 à 1000 heures/an.
- La zone 0, correspond à une zone où les substances indésirables sont toujours présentes soit plus de 1000 heures/an.
- Il n’y a pas de zone 0, et une unique zone 1 (en hauteur et non au sol) sur une unité de méthanisation agricole, et les distances sont minimes (extrait du guide INERIS) :
Je vous laisse relire le propos de M. Chataigner maintenant que celui-ci est recontextualisé dans un environnement que vous connaissez.
La liste n’est pas exhaustive concernant les images d’Epinal utilisées par M. Chateigner, mais abordons maintenant les erreurs méthodologiques de son information.
L’article est disponible via ce lien : erreurs méthodologiques de M. Chateigner
Le 4 Juillet 2024,
M. Desjardin,
Ingénieur-Philosophe
Ingénieur Développeur de Projets Durables chez OPTIBIOM